Jean Moulin: un héros français
Alors que l’on célèbre en cette année 2013, le 70e anniversaire de la création du Conseil national de la Résistance mais aussi de l’arrestation de Jean Moulin par Klaus Barbie à Caluire, et sa mort probablement le 8 juillet en gare de Metz, un bel album très structuré, riche d’illustrations inédites lui rend hommage. Quoi de plus normal que de célébrer ce préfet qui, considéré à ses débuts comme un homme normal, a fait montre de qualités exceptionnelles au service de la France et de ses valeurs en s’offrant en oblation pour la libération de son pays, en gaullien assumé.
On retrouve sous la plume de Christine Levisse-Touzé et de Dominique Veillon l’enfant, l’artiste, le parcours de ce jeune fonctionnaire qui a grandi soutenu par une éducation républicaine dans une famille où les idées du radicalisme n’étaient pas enfouies dans la poche.
Comment celui qui est devenu un héros de France s’est imposé sur l’échiquier de la France combattante? D’abord parce que ce Méridional mobilisé dans le génie à la fin de la Première Guerre mondiale n’est pas devenu l’artiste qu’il révait d’être, pour faire plaisir à ses parents. Il s’est construit dans l’administration d’Etat et a eu la chance comme sous-préfet d’Albertville de rencontrer le député de Savoie, Pierre Cot qui, bientôt ministre, lui a permis d’accéder à des responsabilités de cabinet à Paris avant d’en faire un préfet territorial rigoureux et intransigeant lorsqu’il s’est agi de défendre les valeurs authentiques de la République.
C’est ce qu’il fait à Chartres alors que la France est au bord de l’abîme. Il incarne le rempart républicain et humaniste debout devant le nazisme intransigeant. « Je n’ai jamais caché mes sentiments politiques et j’entends servir sans faiblesse un idéal qui m’est infiniment cher ».
C’est ce qu’il a fait jusqu’à sa mort en endurant les souffrances infligées par ses bourreaux mais en ne révélant rien. Il est parti sans mesurer l’ampleur du travail accompli au service de l’unité de la Résistance qu’il a su fédérer pour le plus grand bien de son pays.
Rex, le pionnier a été critiqué par ceux-là mêmes qui ont compris sa vraie dimension de chef , celle qui n’avait pas surgi lorsque le jeune homme faisait ses études. Il était un élève honnête sans plus, en revanche lorsque les événements ont exigé que des hommes d’Etat se découvrent au service de la France, il a été des meilleurs et des plus exemplaires.
A-t-on retenu son appréciation: « Mes chers amis, rien ne peut plus diviser les Français. Ils n’ont qu’une volonté, sauver leur pays par la victoire »? Artisan de la légitimité résistante, il a été d’une fidélité absolue au général de Gaulle. Tout semblait les séparer mais la grandeur de la France, la devise de la République, les ont rassemblés.
Résistant jusqu’au bout, entré au Panthéon de la Nation avec l’onction du discours inoubliable d’un André Malraux transcendé par l’émotion, il a été un chef qui méritait bien d’être nommé général de division à titre posthume. Un album qu’il faut lire parce que Moulin, c’est aussi la France debout.
Christine Levisse-Touzé, Dominique Veillon, « Jean Moulin, artiste, préfet, résistant », Tallandier, 192 p., 31,90 euros.